15 janvier 2010

La Superbe, toujours magnifique, même dans un hangar

La Superbe
par Benjamin Biolay (2009)

La patine des vieilles industries résonne sombre dans mes oreilles, architecture toujours capable de m'hypnotiser. La friche industrielle, l'écho des vieilles révolutions et d'efforts anciens, un passé s'efface et laisse encore une trace dans quelques rues lointaines, anciens faubourgs souvent accolés aux centres villes par l'extension urbaine. Une sorte de grandeur & démesure résonne, oui, résonne, attirait mes photos lors de mes promenades de la Ruhr et capte encore mon attention, une poésie désuète et encore forte.

Tuyaux et immenses hangars et échafaudages immenses des industries sidérurgiques, fumant et brillant encore dans la nuit, dans le creux de Duisburg, du port de Dunkerque ou dans l'Est de Montréal. Les mêmes images sur le papier contant les enquêtes de William T. Vollmann au Kazakhstant : gigantisme démodée, inévitable, toujours vivant même démodé, oeuvrant toujours derrière l'économie numérique ou les finances.

La rouille zèbre les poutres d'une usine et voici un décor poétique où me perdre, un amas de teintes mortes, sales et surprenantes, loin de toute nature, source de rapprochements. Quel joli collage que de découvrir des prises d'escalade dans les anciennes réserves à charbon : la réhabilitation industrielle en immense mise en scène surréaliste portée sur un ton désinvolte, l'air de rien, un vieil ouvrier blasé.

Un tel décor doit même pouvoir accueillir d'autres oeuvres et d'autres émotions, carrière de métal se faisant scène, comme une carrière de pierre accueille le théâtre et les jolis textes en Avignon. La poésie, la danse et la musique dans les anciennes usines Clacquesin, dans une ancienne factory pour y étendre son pouvoir de fascination, une fois mêlée à une autre source de fascination.

Et voici donc un superbe Benjamin Biolay introduisant sa magnifique chanson dans les murs d'un long hangar. Une vidéo en un unique plan séquence, caméra flottant selon les pas de Biolay et les pas de danse, les étreintes et les boucles visuelles, un fil qui ne se relâche jamais, qui reprend toujours son souffle chaque fois qu'on le croit suspendu et s'arrêtant. A la manière des strophes de "La Superbe", surgissant sans fin et renouvelant les images sur un ton délavé, les jolies surprises, des éclaboussures, des raies de lumières éblouissantes passant par une verrière déglinguée qui a beaucoup vécu.


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