19 mars 2009

Lire et parcourir les livres pour construire le monde dans un village mexicain

El ultimo lector 
by David Toscana (2005)

Le dernier puits ayant encore un peu d'eau dans Icamole, pauvre village mexicain touché par la sécheresse, jalousement gardé secret par son propriétaire ; les villageois doivent attendre les mules rapportant les bidons depuis la ville voisine, traînant la charrette aux milieux des camions, mais Remigio peut se pavaner rasé et le visage frais, son eau n'est pas réservée à la seule consommation. Mais voilà maintenant ce dernier puits rendu inutilisable par une visiteuse imprévue, fillette de la ville en jolie robe blanche ; cadavre dormant paisiblement au fond du puits.

Comment cacher le corps ? Comment imaginer d'où elle vient, qui l'a placée là ?
Seule solution au mystère, la littérature, et les livres de la bibliothèque de Lucio, dernier lecteur du village hormis les trois élèves de l'école venant consulter les encyclopédie. Bibliothécaire consciencieux, il trie les livres fournis par l'état ; les meilleurs survivent, et les symboles de la littérature facile, des bons sentiments convenus, les phrases au style paresseux et abusants des parenthèses sont jetés à la cave, dévorés par les cafards. Heureusement, les petites filles n'apparaissent sous la plume des auteurs masculins que pour le désir et la folie qu'elles suscitent, et ceux même dans les ouvrages non censurés et livrés aux cafards.

Alors Remigio apprendra que la fillette s'appelle Babette et a jeté son parapluie dans la Seine pendant la révolution française. Que les petites filles doivent s'enterrer sous les racines d'un arbre et que les fruits s'en trouveront fertiles, au risque d'en devenir souriants. Que le dernier sentiment humain avant de mourir, ce n'est pas l'injustice et la douleur profonde, non, le dernier, c'est la honte, comme celle des boucs que l'on poignarde dans l'abdomen et les regardant droits dans les yeux.

Lucio tournent les pages de ses livres et en donne la lecture au village, à son fils au puits accueillant la petite fille, aux policiers, aux bigotes, à la mère dépossédée de son enfant. Le récit et la construction pour repousser la bêtise et corriger les fautes d'orthographe sur les reliques des église, pour construire le monde et remplir tous les vides.

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