21 avril 2009

Un échiquier un peu convenu mais que l'on dévore tout de même en avion

L'échiquier du mal - Livre 1: Ouverture 
par Dan Simmons (1989)

La violence, les accès de violence humaine, incompréhensibles et enivrés, incontrôlables, souvent incompréhensibles ; ils ne semblent pas répondre à l'entendement et à la raison, d'étranges pulsions baroques poussant parfois au meurtre et au pire. Plus encore fascinante et incompréhensible devient la violence quand elle se répand et semble sauter d'une âme à une autre, gagnant un groupe et parfois une société ; le génocide, depuis la Shoah jusqu'aux contrées rwandaises, insaisissable et comme inconcevable, comme un fil se tendant soudain dans le coeur pour pousser les plus placides à l'exaction.

Suggérer l'image d'un fil entrant en résonance, il n'est pas facile d'aller beaucoup plus loin pour un individu maladroit se trouvant désemparé face à l'inconcevable de la pulsion violente. Mais qu'en serait-il si un tel fil n'était pas qu'une métaphore, si une poignée d'êtres malveillants étaient capable de flatter le fil pulsionnel de chacun, de pousser les uns et les autres au meurtre, de déclencher le doigt de la main qui vise John Lennon ?

Nous voici donc plongeant dans ce long roman fantastique où apparaissent quelques individus ayant une telle capacité. Doté de ce don psychique, le Talent, ils peuvent prendre le contrôle des êtres, les manipuler, les pousser au meurtre, jouer avec eux et surtout, jouer entre eux par l'entremise de ces soldats devenus incapables d'exercer leur volonté.

Dan Simmons prend donc ce point de départ simple et presque convenu, et se lance dans son habituel mélange de références et points de vue. Psychologie de groupe et étude de la violence, enquête sur la Shoah, théorie du complot, meurtre de John Lennon ou de JFK, critique de la photo d'art, les pistes sont variées mais, avouons-le, sans grande originalité ; jamais ne surgit vraiment la surprise ravie qui prenait le lecteur parcourant les arcanes folles de l'immense Hyperion. Infime déception pour le fan de la grande fresque SF autour de Keats, mais la lecture de cet échiquier reste infiniment prenante, les personnages attachants malgré leur faible épaisseur, et quelques tours de force font apparaître un grand sourire ; tel ce long chapitre où deux vieilles femmes douées du Talent tentent de s'assassiner des plus cruelles manières, manipulant le premier venu, vieux chauve, grand noir, gardien de nuit, fillette ; série hallucinante et sans fin qui laisse la police locale dans la plus grande perplexité face à ce serial killing incompréhensible et saturé d'humour noir. 

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