21 juin 2009

Découvrir MacIvor au Fringe Festival d'Ottawa

Wild Abandon 
by Daniel MacIvor - directed by Dave Dawson, with Zach Counsil 


Une vingtaine de personnes dans la salle, dispersées sur la douzaine de rangées de chaises installées au sous-sol. Quatre tentures noires pendent sous quelques projecteurs colorés, trois paires de photos grand format, un oeuf en plâtre d'un volume généreux ; un longue chaîne glisse du plafond au plancher en milieu de scène. Un seul comédien au physique massif, aux joues rouges & lisses, au corps étonnamment jeune : Steve nous parle de sa solitude.

Le Fringe Festival débute ce week-end à Ottawa et voilà que reviennent d'agréables souvenirs de festivals de théâtre. Les barrières entourant l'Université d'Ottawa se sont recouvertes d'affiches de spectacles fixées sans discontinuer sur du carton, les abords des salles permettent d'élargir sans effort sa collection de flyer colorés : vous cherchez un spectacle pour ce soir ? Vous aimez rire, vous aimez l'humour noire ? Vous devriez venir découvrir notre spectacle dans le marché, nous jouons dans moins de trente minutes, vous pourrez voir deux des comédiennes les plus intéressantes d'Ottawa ; et nous avons reçu aujourd'hui même de très bonnes critiques dans l'Ottawa Citizen. Nous comptons sur vous !

Réminiscence du festival d'Avignon, ses rues en immense continuum d'affiches et de défilés de troupe, l'incessant ballet des flyers reçus et des petites scènes improvisées pour attirer le spectateur ; les us des comédiens ne varient pas tellement d'un continent à l'autre. Ottawa n'offre pas 800 spectacles comme le festival off d'Avignon, mais le programme propose presque 200 références sur une trentaine de pages, une douzaine de salles à explorer pendant la semaine de réjouissances.

Nous n'avons pas lancé notre exploration du théâtre canadien par l'ostensible Pornstar, son affiche mariant fesses nues et tour de Toronto ; nous sommes allés goûter à Wild Abandon du dramaturge Daniel MacIvor, présenté en sous-sol de l'Université d'Ottawa. Monologue d'une petite heure nous présentant le solitaire Steve, angoissé, doucement paranoïaque, troublé par les interrogations parentales, par l'amour comme preuve de haine, par les différents rôles sociaux de la danse. Spectacle nimbé d'humour sombre, d'excitation désabusée, et le comédien jongle joliment avec les différentes voix présentées, enchaînant avec fluidité les différents états d'âme de Steve. Défi assurément peu évident : MacIvor a créé cette pièce pour sa propre interprétation, et l'on devine les tiens forts entre l'écriture du texte et son jeu de comédien. Mais les circonvolutions absurdes et angoissées sont suffisamment plaisantes pour survivre à une deuxième création : comment résister à la scène d'ouverture, dépeignant un Steve adolescent dans un restaurant, agressé à la fourchette par la femme qu'il imaginait être sa vraie mère ?

Le théâtre de MacIvor méritera certainement une plus ample exploration, vue sa place dans la dramaturgie canadienne des 20 dernières années. Et le Fringe Festival devrait également réserver d'autres jolies découvertes, suggérées par la fin de soirée passée dans un petit parc près de l'Université. Croisement de comédiens et de musiciens échangeant flyers et impressions sur le public de leur spectacle. Un joueur de cornemuse explique que le Canada est certainement le deuxième pays de la cornemuse après l'Ecosse ; il multiplie lui-même les collaborations, il a même repris les Clash avec le groupe ska Rudeboy aperçu le week-end dernier au Westfest. Sur scène, les Snakecharmers laisse couler leur fascinant flot musical : la basse virevolte doucement autour des riffs lancinants de cithares, les mots africains résonnent au dessus des secs bondissements de tam-tam. Un danseur enthousiaste laisse onduler ses membres devenus caoutchouc sous les teintes de l'expérience sonore, et même immobile, on l'accompagne doucement les yeux mi-clos.

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