by Michael McGowan, with Noah Reid, Olivia Newton-John, Walter Gretzky, Hawksley Workman (2010)
"Une comédie musicale sur le hockey ?"
"Oui, ça a l'air assez ridicule, mais ça devrait être distrayant, et terriblement Canadien."
Hélas...
Bien entendu, que peut-on vraiment attendre d'une comédie musicale ? Il ne devrait pas y avoir de surprise face à un scénario schématique, mono-dimensionnel, convenu : Farley Gordon est un génie de la rondelle, mais couvé par des parents intellectuels, n'a jamais joué en compétition ; jusqu'à ce qu'un propriétaire d'équipe l'aperçoive, et en fasse une star montante. Farley Gordon saura-t-il trouver sa voie, concilier son goût de la technique face à la violence de la Ligue, saura-t-il entendre l'amour de sa voisine de palier, éternelle amie d'enfance ? Rituel adolescent, passage à l'âge adulte, on imagine les scènes, et les chansons aussi, refrain sur l'air de "fais ce qui te tient à coeur"ou "en hockey, pour être un homme, il faut se battre".
Au début, on sert les dents, guette les scènes sur glace, digère doucement les chansons pas désagréables ; on sert les dents sur les blagues rarement bonnes, lourdes, tellement bêtes qu'elles apportent un peu de stupidité. On attend avec impatience la grande compétition, les grandes scènes chorégraphiées sur glace en plan large, le mélange du "best game of the world" avec la musique et la danse, avec le cinéma.
Hélas...
Tout dérape vite vers des enjeux assez anodins. L'histoire d'amour avec la voisine de palier (musicienne, what else?), perturbée par un italien pianiste séducteur. La violence du hockey, les combats à coups de poings, qui font horreur à l'ancien garçon bien comme il faut. Le tout saupoudré par les apparitions pas très bien réglées de quelques stars du hockey. Tout cela zigzague doucement, perd peu à peu de rythme, quitte même les patinoires pour s'attarder trop sur la dérisoire bluette sentimentale. Pour se conclure par une grande scène de patinoire sans même de match. Bon sang, mais que s'est-il passé ?
Pourtant, quelques bonnes idées avaient germé dans la première moitié du film. Le jeune prodige aussitôt saisi par une firme marketing, propulsé comme la future vedette du sport nationale ; alternant apparitions publicitaires, passages réglés à la télé, couverture des grands magazines de hockey. On sentait un peu de la passion du jeu, des enjeux associés au hockey au Canada, les discussions incessantes qu'il peut générer ; et tous les vautours qui tournent autour des jeunes talents. Sans même tenter un regard grinçant sur le sport professionnel et ses dérives, il y avait beaucoup à creuser en présentant cette obsession canadienne nationale. Le hockey, plus grand sujet de discussion au boulot n'importe où au Canada, toutes ces pages dans les journaux, toutes ces statistiques, le poids d'anciennes stars comme présentateur télé, comme icônes nationales. Tout un terreau qui pouvait susciter de belles scènes en contre-points, des histoires avec des groupes de supporter du petit club, un regard sur le phénomène hockey.
Souvent, au cours du film, les gens chantent le hockey comme le plus sport du monde. Rien ne permet de toucher à cette beauté, à la passion du peuple pour ce sport, et aux raisons associées à cette passion.
Car la plus grande frustration du film reste sa faiblesse en matière de hockey pur. En début de film, le jeune génie dribble tous les défenseurs, finit toujours par marquer sur son petit terrain de quartier. Il arrive dans l'équipe de jeune, et reproduit les mêmes exploits, juste perturbé par la présence du contact physique dans la compétition. Pas une scène d'entraînement, pas une seule vraie compétition pour induire un peu de tension, aucun de ces deux classiques du film de sport ; pas une seule vraie ACTION de hockey sur glace. Tout la glace réduite à cette question : doit-on accepter de se battre sur glace quand on joue au hockey ?
Le problème n'est pas dans la pertinence de cette question. Il est toujours surprenant de voir les supporters se réjouir quand deux joueurs, jeunes ou pro, commencent un combat de boxe instable sur la glace. Tout le machisme latent de ce sport est un thème qui mérite réflexion, quelques interrogations. Mais le film est incapable de réfléchir vraiment à cette question, réduite à une opposition entre coach barbu / couillu, et peur prof d'université décoiffé... Manichéisme noyé dans quelques blagues potaches de vestiaires, hockeyeur bas du front pétant sur briquet ; manichéisme dénoué sans conviction par une pirouette de scénario atterrante : Farley Gordon accepte de revenir sur la glace, d'affronter son adversaire, mais il se bat en lui offrant un terrible calin... Audace scénaristique de bisounours, et on se demande quel producteur a pu accepter une telle galipette, un tel "je glisse doucement les enjeux narratifs sous le tapis et on n'y voit que du feu".
Film désespérant, qui perd ses quelques pistes narratives, glisse des chansons au classicisme banal dont aucun refrain n'est vraiment marquant ; et offre un idéal de vie assez saumâtre : épouser la fille d'à côté connue depuis l'âge de 2 ans... Bonjour la révolution.
En creux, sans le vouloir, Score offre un portrait du hockey dans ses côtés les plus tristement conservateurs : glorification de l'amitié virile, victoire du joueur doué d'un talent naturel, histoire d'amour locale. Toute une hiérarchie stable & figée, société de valeurs - les vraies bonnes valeurs. D'une certaine manière, cet aspect est présent dans le hockey canadien : il n'y a qu'à entendre le bon vieux Don Cherry, vieux consultant vedette, glorifiant sans fin le hockey viril, les joueurs bagarreurs, les vrais hommes - "le VRAI hockey comme on l'aime".
Dans ses limitations, Score présente les travers du hockey et ses mythes limités, et ce avec un naïveté presque confondante ; mais il n'y a pas vraiment de quoi être fier.
Deux vidéos de commentaires de Don Cherry...
Le hockey dans sa subtilité et sa finesse théorique...
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