8 décembre 2010

Nowhere Boy, un jeune Lennon en une dimension

Nowhere Boy 
by Sam Taylor-Wood, with Aaron Johnson, Anne-Marie Duff, Kristin Scott-Thomas (2009)

John Lennon est mort il y a 30 ans mais auparavant, John Lennon a aussi été jeune. Et une jeunesse pas extrêmement rose, passée majoritairement auprès de sa tante Mimi. John a été élevé par cette dernière, car la mère vaguement irresponsable n'a pas pris soin de l'enfant. Mais la mère n'habite pas loin, et à l'adolescence, le jeune John prend l'habitude de lui rendre visite

Nowhere Boy tente de tisser un film à partir de cette histoire familiale instable, la tension entre deux figures maternelles : Mimi, calme et conventionnelle, face à la mère, fantasque, instable, fan de rock'n'roll. Petit John ne va pas trop à l'école, peu motivé, traine avec des amis. Butine des moments de détente auprès de sa mère. Apprend la musique au banjo auprès d'elle, se lance dans le rock vêtu d'un blouson de cuir par amour pour Elvis. Hésite entre les deux mères, la convention à l'amour sobre mais constant, le pétillement à l'amour si instable.

Nowhere Boy navigue entre ses petits thèmes sans trop choisir, et sans vraiment offrir grand chose. Petite fresque d'hésitation adolescente dans les 50s de Liverpool, bien conventionnels, comme on s'en doutait, ou comme le film prend plaisir à la souligner - on ne sait plus trop, passé un certain point, si le film raconte ou si le film se plait à mettre en image des clichés sur les années 50s. La tante, la mère, la famille recomposée, le regard de la société puritaine britannique, et les jeunes qui goûtent peu à peu au rock'n'roll.

Rien d'irregardable, mais rien de bien passionnant au final. Comédiens propres, plans nets, plutôt jolis, flux narratif banal, un peu mou. Le jeune Lennon presque en ligne, presque comme un album de Tintin, avec quelques pincées de tension mère - fils pour faire le compte.

Bien sûr, en fil directeur, on a droit à une sorte de "marche aux Beatles", comme on parle de marche à la guerre, inéluctable, tracée dans les livres d'histoire en quelques grands repères historiques. John écoute Elvis avec sa mère. John apprend le banjo. John achète une guitare. John monte un groupe. John rencontre Paul apprend un concert dans un champ. John & Paul rencontre George. A la fin, les 3 jeunes rockers s'envolent pour Hambourg. Entre les scènes, on a aperçu le nom de Strawberry Field, le jardin public tout près (but you know what I mean).

Là aussi, la démarche menant aux Beatles semble vaguement fade. Certes, John et Paul ont tout deux une situation compliquée avec leur mère, ferment suggéré de leur amitié. Certes on sent le jeune John sur le fil, rempli d'énergie, cherchant une rebellion, un besoin de libération ; Aaron Johnson ne se débrouille pas trop mal en ado tournant petit rocker, mais le film ne propose pas grand chose d'autre qu'une lecture "le rock en libérateur des pulsions ado". La bande son n'est pas désagréable, mais éclaire peu sur la transition de John et des Beatles du stade j'écoute du rock à j'écris du rock, j'écris les Beatles. Comme souvent dans les biopic rock, les quelques scènes d'écriture de chanson ne montrent rien, n'inventent rien, ne cherchent rien.

Comme le dit Serge Kaganski dans les Inrocks, un grand créateur n'a pas forcément une enfance hors du commun. Pas de problème. Mais pourquoi en faire un film en ce cas ? Et pourquoi se cantonner à cette simple adolescence de Liverpool ? Le départ pour Hambourg, la cristalisation du rock sauvage des Beatles entre la faune du port allemand, voilà un passage riche, ou du moins un contrepoint pour une histoire de jeunesse en deux temps. Sans même chercher à atteindre le kaléidoscope fantasmé de Todd Haynes pour son I'm not there sur Bob Dylan, peut-être y avait-il un film plus fou à tenter dans cet enchaînement Liverpool - Hambour...






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