14 septembre 2010

Rabbit, Run, et Updike offre une jolie démonstration littéraire

Rabbit, Run
by John Updike (1960)

Rabbit, un surnom reçu durant sa gloire dans l'équipe de basket universitaire.
Rabbit, une gloire sportive.
Et maintenant, Rabbit court, s'enfuit, il prend la route pour échapper à sa vie quotidienne.

C'est ainsi que commence le fameux roman de John Updike, par la fuite de Harry "Rabbit" Angstrom un soir comme un autre, prenant sa voiture et abandonnant sa femme en ceinte et son tout jeune fils. Route de nuit, stations services, dîners dans des petits restau bons marchés, les routes américaines la nuit et la fuite vers le sud. Quelques pages à peine et la description d'une vie de banlieue des années 60 s'est changée en road story, les regards suspicieux vers l'étranger ou le bruit de la radio, les carrefours sombres au niveau desquels on se perd la nuit. Un goût classique de littérature américaine et la plongée sur la route.

Mais Updike ne cherche pas à écrire à nouveau Sur La Route, il s'intéresse aux dilemmes d'un américain moyen, à sa petite vie étriquée, aux frictions avec sa gloire passée de surdoué du sport. Au bout de 50 pages, Rabbit revient dans sa ville d'origine : quittant sa femme, vivant avec une semi-prostituée, mais au sein même de sa communauté. Scandale, joli approche du texte, Rabbit ne se sent pas vivre auprès de sa femme qui était pourtant si mignonne, mais n'est plus qu'ennyeuse et alcoolique - mais il ne sait pas non plus où aller ou vers quoi plonger et prendre un nouveau départ. Abandon et unité de lieu, le bal des personnages peut se lancer, joli fille chez qui on s'installe sur un coup de tête, belle-famille réprobatrice, prêtre aux méthodes peu orthodoxe, les personnages entrent peu à peu en scène et multiplient les approches, offrent épaisseur et variété à cette situation simple : l'abandon et l'à-quoi-bon.

La souplesse du style et la finesse des situations gagne peu à peu le lecteur, maintenant l'intérêt par son approche prisme, sorte d'inclinaison discrète du miroir pour mieux observer ce Rabbit. Et tout près de la fin, Rabbit s'échappe de nouveau, et l'auteur reste avec la femme abandonnée. Sa soirée de plongée dans l'alcool est un sommet d'émotion glauque, d'horreur quotidienne saisissante.

Les critiques françaises de l'époque semblent avoir plutôt surligné le côté conservateur et moraliste du roman ; difficile en effet de ne pas sentir un certain dégoût perplexe pour le comportement immature de Rabbit. Mais la tonalité ne semble pas trop insistante, et la qualité de l'écriture donne surtout l'impression de lire un joli classique. Il sera intéressant d'explorer les 4 tomes suivants de la vie de Rabbit, publiés sur près de 40 ans...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire